K 118

Autre projet dont sont en charge les architectes suisses du Baubüro in situ, la transformation en ateliers et espaces de travail d’un ancien entrepôt, le Kopfbau 118 sur la Lagerplatzareal à Winterthour en Suisse, est en cours de réalisation. Trois nouveaux étages y sont rajoutés à la structure existante. Les ateliers se distribuent aux différents étages autour d’une cuisine commune, sont pourvus de sanitaires et de loggias et sont accessibles par ascenseur ou via un escalier extérieur. Comme dans le cas de la Lysbüchelareal, les architectes ont appliqué le principe de l’urban mining afin de réaliser cette extension avec des matériaux réemployés ou réutilisés, sans que cela n’affecte le coût global du projet. Ceux-ci représentent 58% du volume en m³ de l’ensemble des matériaux potentiellement réemployables ou réutilisables sur le projet. Cette pratique, lorsqu’on la compare à l’utilisation de matériaux neufs, a contribué à une diminution de 55% des émissions de gaz à effet de serre, soit environ 500 t CO2 équivalent !

Véritable “chasse au trésor”, la recherche de matériaux sur différents chantiers à travers la Suisse ou en suivant de près l’octroi de permis de démolition, a été suivie du stockage des éléments découverts. Ceux-ci étaient également mesurés et inventoriés à l’aide d’un numéro d’identification et d’un passeport de stockage regroupant les informations permettant leur future intégration au projet. Ce travail de documentation s’accompagne de démarches souvent coûteuses dans le but de satisfaire aux normes en vigueur, comme lors de l’ajout de double vitrage aux fenêtres de réemploi. Une certaine souplesse des autorités a par ailleurs facilité l’obtention du permis de construire alors que les caractéristiques de divers éléments, comme la couleur des futures façades, n’étaient pas encore connues.

Pièce maîtresse de ces éléments de réemploi, la structure en acier des nouveaux étages est issue de l’ancien centre de distribution de la Lysbücherareal à Bâle. Sa forme rectangulaire ne correspondait pas au bâtiment trapézoïdal existant à Winterthour mais le problème a été résolu moyennant un porte-à-faux. L’ossature en acier a été bétonnée afin de la faire correspondre aux normes incendies mais les connexions des différents éléments métalliques n’ont quant à elles été enduites que de mortier afin de faciliter leur démontage et un éventuel futur réemploi. D’autres pratiques durables accompagnant le réemploi sont également observées dans le projet : le recyclage (des murs en béton recyclé adaptés aux normes sismiques par exemple) ou des techniques traditionnelles d’utilisation de matériaux naturels. Si l’enveloppe extérieure du bâtiment est en bonne partie constituée de fenêtres et de tôles métalliques de réemploi, une structure secondaire en bois encadrant les fenêtres est ainsi isolée avec de la paille puis recouverte de terre.

Le projet de Baubüro in situ a également été l’occasion d’une collaboration avec une vingtaine d’étudiants de la Haute École Spécialisée de Winterthour (ZHAW). Ils avaient, avec une série de matériaux de réemploi, à imaginer un projet pour le futur K 118 et ont pu prendre part au processus d’urban mining. Leur travail, ainsi que celui de Baubüro in situ, a contribué à l’exposition “Transform” en 2018 au Musée Suisse d’Architecture à Bâle (S AM), présentée par la suite sous le titre “Bauteilrecycling” au département d’architecture de la ZHAW en 2019. Elle mettait notamment en avant cette démarche d’urban mining pratiquée par les architectes, en exposant une série de matériaux de réemploi ainsi qu’un mock-up de la future façade du bâtiment.

Suit ici une liste de matériaux de réemploi utilisés dans le projet:

  • Structure métallique en acier de plusieurs étages provenant d’un ancien centre de distribution (Bâle) et âgée d’une quinzaine d’années;
  • Stores, lucarnes et fenêtres (Winterthur et Zurich);
  • Tôles métalliques rouges en aluminium utilisées en façade et provenant d’une ancienne imprimerie (Winterthur);
  • Escalier extérieur en acier provenant d’un ancien immeuble de bureaux (Zurich) et balustrades d’escalier;
  • Dalles de parement en granit provenant d’un immeuble de bureaux (Zurich) et utilisées dans les loggias;
  • Portes diverses, dont une porte massive en verre et aluminium (Zurich) utilisée dans l’entrée principale;
  • Planchers en bois (Winterthur) et planches en bois massif, rabotées et utilisées comme cloisons;
  • Installation photovoltaïque d’une dizaine d’années (Zurich);
  • Radiateurs (Winterthur);
  • Briques et blocs de différentes dimensions;
  • Installations et éléments sanitaires;
  • Placards divers.

Ce texte se base notamment sur deux articles parus en allemand dans Der Landbote en mai 2020 et dans Baublatt en juillet 2020, et disponibles sur le site de Baubüro in situ, ainsi que sur un article publié dans la revue suisse Tracés et disponible sur l’espace numérique pour la culture du bâti espazium.ch

Sala Beckett

À Barcelone, le bureau d’architecture Flores & Prats Architectes, est l’auteur de la réhabilitation de l’ancien site de la Cooperativa de Consumo Pau i Justicia, amené à devenir la nouvelle Sala Beckett (Fundació Sala Beckett / Obrador Internacional de Dramatúrgia). La coopérative, inaugurée en 1924 et abandonné dans les années 90, abritait une école, un magasin, ainsi qu’un café et une salle de théâtre, chacun de ces usages fonctionnant de manière indépendante. Le nouveau programme, qui regroupe une école de théâtre, des espaces de représentation et un bar, cherche au contraire l’interaction entre ses différentes fonctions. Celle-ci se fait notamment via un foyer aux nouvelles percées de lumière, qui connecte les différents niveaux et où peuvent se croiser les étudiants, les professeurs, les artistes mais aussi le public et les gens du quartier.

Les architectes décrivent leur première visite du bâtiment comme un voyage dans le temps. Sera réalisé un inventaire exhaustif – plus de cent plans comportant des dessins à différentes échelles – des restes encore visibles de la coopérative. Il s’agissait principalement de menuiseries, de revêtement de sol et de rosaces. Ces dessins ont permis de rendre visible chacun des éléments de façon détaillée, mettant en évidence leur état de conservation et leurs dimensions et valorisant de cette façon l’héritage qu’ils représentent. La décision a donc été prise de maintenir dans la mesure du possible les larges espaces existants ainsi que leur structure mais aussi les plus petits éléments qui avaient été inventoriés, afin que puissent coexister le passé de l’ancienne coopérative, les traces de l’abandon et les adaptations nécessaires au nouveau programme.

Si les éléments inventoriés ont été réemployés in situ et dans leur fonction initiale, ils l’ont cependant été dans la majorité des cas à un autre endroit du bâtiment, celui-ci devant être adapté à de nouvelles normes, à un nouveau programme et à certaines modifications d’ordre structurel, ce qui a transformé le travail des architectes en un véritable collage. Certains éléments structurels, de nouvelles finitions ainsi que du mobilier ont par ailleurs été incorporés aux espaces et aux éléments existants.

En ce qui concerne les menuiseries, 90% des portes et fenêtres ont été réemployées, la majorité d’entre-elles en étant adaptées ou réparées. Certaines portes ont ainsi dû être raccourcies pour les adapter à l’augmentation de l’épaisseur des planchers qui devaient être renforcés et certaines fenêtres ont été équipées d’un double vitrage. Ces transformations et réparations ont été effectuées in situ, faisant ainsi l’économie du transport. Un escalier ainsi que plusieurs garde-corps ont également été réemployés, ces derniers étant eux aussi adaptés en vue de leur réinstallation.

Le revêtement de sol de chaque espace de l’ancienne coopérative était à l’origine constitué d’un type de carrelage différent. Les espaces de répétition ou de représentation nécessitant un revêtement plus adéquat, leur carrelage a été déplacé dans d’autres zones du bâtiment, ce qui a permis la création de nouvelles combinaisons. Au moment de leur démontage, 20% des carreaux ont été perdus. Cette proportion sera dès lors prise en compte au moment de planifier leur réinstallation.

Trois rosaces qui provenaient du toit de l’ancienne salle de théâtre de la coopérative ont pu être sauvées et utilisées en tant qu’éléments muraux décoratifs. Les rosaces existantes dans d’autres parties du bâtiment ont été quant à elles conservées à leur emplacement d’origine et incorporées au système de climatisation.

Avant le début des travaux de réhabilitation, l’équipe de la Sala Beckett a occupé de façon éphémère le premier étage de l’édifice. Dans une logique similaire à celle du projet principal, a été réalisé un inventaire du mobilier provenant de leur ancien site dans le but de le réemployer dans le bâtiment de la coopérative. Cette occupation temporaire et transitoire a permis de mettre à l’épreuve le nouveau programme ainsi que son incorporation au bâtiment, mais a aussi favorisé pour l’équipe, les étudiants et le public, l’adoption du lieu et des éléments qui allaient être réemployés. Par la suite, un projet culturel et théâtral qui évoquait la mémoire du bâtiment y a été réalisé, le transformant tout entier en lieu de représentation. Le jeu théâtral parcourait ainsi l’espace et le temps comme l’avait fait l’architecture grâce aux inventaires et au réemploi.

Suit ici une liste non exhaustive d’éléments réemployés (source Flores & Prats et Opalis) :

  • 200 m² de carrelage (finitions murales et de revêtement de sol), démontés, lavés et réinstallés in situ;
  • 44 portes en bois, nettoyées, adaptées et réparées in situ;
  • 35 châssis de fenêtre en bois, nettoyés, adaptés et réparés in situ;
  • 1 escalier;
  • garde-corps;
  • 3 rosaces, utilisées comme décorations murales.

Cet article s’inspire en partie du livre Sala Beckett – International Drama Centre et de la série documentaire Escala 1:5.

ELYS, Lysbüchelareal Basel

La zone urbaine Lysbüchel, dans le canton de Bâle-Ville en Suisse, qui jusqu’il y a peu était un site de production et de distribution d’une chaîne de supermarchés, est en cours de transformation à travers l’opération VoltaNord afin d’y amener entre autres des fonctions résidentielles. C’est au cœur de ce nouveau quartier que se trouve le Centre de culture et artisanat ELYS dont l’ouverture est prévue pour l’automne 2020. Le bâtiment datant de 1982 est une ancienne boulangerie industrielle et centre de distribution. Aux commandes de cette reconversion, le bureau d’architecture suisse Baubüro in situ, très actifs dans la réhabilitation et le réemploi.

Le choix du réemploi et de matériaux locaux a nécessité un intense travail préalable de recherche, de collecte et de déconstruction puis de stockage, ainsi qu’une conception différente du projet où le design est conditionné au type de matériaux découverts. Une collaboration étroite avec les autorités et le maître de l’ouvrage, les différentes équipes techniques et les usagers a également été nécessaire. Pour des raisons urbanistiques, le bâtiment a dû être raccourci à l’Est, laissant un vide qui devant être comblé par une nouvelle façade. Afin d’amener de la lumière, un atrium est également créé. Deux extensions voient par ailleurs le jour en toiture. La nouvelle façade Est et celle de l’atrium constituent les principales interventions sur l’édifice existant et font la part belle aux matériaux de réemploi ou d’excédent de stock.

A été fait le choix de modules préfabriqués en bois afin de réaliser ces quelques 1000m2 de nouvelles façades. Pour ce faire, du bois de réemploi collecté dans les environs (40%) ou originaire de forêts suisses (60%), a été transformé en poutres lamellées collées répondant aux exigences techniques pour la construction bois. Ces poutres ont été utilisées par la suite pour former les cadres compartimentés des modules de façade qui peuvent atteindre 9m de haut. La souplesse offerte par ce mode de construction a permis d’y intégrer des fenêtres aux composants, à l’aspect et aux dimensions très diverses, provenant d’excédents de stock de fabricants contactés dans un rayon de 100km autour du projet. Transport et stockage compris, le prix moyen de ces fenêtres a été évalué à 290 francs suisses (environ 270 euros), bien moins que leur prix neuf. Cependant, aucune garantie n’était plus offerte par les fabricants. Une partie de l’argent économisé a donc été affecté à la création d’un “fond de réparation”. Après installation des fenêtres, les différents compartiments des modules en bois ont été remplis de fibres et de morceaux de laine de roche de réemploi. L’enveloppe extérieure du bâtiment est quant à elle constituée en partie de tôles métalliques trapézoïdales grise (pour les extensions en toiture) ou verte (pour les modules de façade) et provenant principalement du bâtiment lui-même.

Suit ici une liste de matériaux réemployés dans le projet :

  • 2000 m2 de tôles métalliques trapézoïdales utilisés pour l’enveloppe du bâtiment, dont 1500 m2 ont été récupérées sur le bâtiment lui-même et sur un ancien entrepôt situé à proximité;
  • 200 fenêtres différentes provenant des stocks excédentaires de 12 fabricants des environs;
  • 150 m3 de bois provenant de la charpente d’une usine et transformés en poutres lamellées collées;
  • 150 m3 d’isolation en laine de roche;
  • Grilles caillebotis provenant de l’ancienne installation de chauffage central et utilisées comme garde-corps pour certaines fenêtres;
  • Tuyaux provenant de l’ancienne installation de sprinklers et transformés en supports pour les bancs de l’espace extérieur;
  • Dalles de béton provenant de l’ancien toit plat.

Ce texte se base notamment sur la contribution de Baubüro in situ au livre “umbaukultur” et dont la version en anglais est disponible sur leur site ainsi que sur un article publié dans la revue suisse Tracés et disponible sur l’espace numérique pour la culture du bâti espazium.ch.

Grande Halle de Colombelles

L’atelier électrique et la tour de refroidissement d’une ancienne société métallurgique française sont les seuls éléments ayant été conservés sur un site appelé à être reconverti. L’opérateur à majorité publique, Normandie Aménagement, en charge de cette reconversion a fait appel aux architectes de l’atelier Construire et à ceux d’Encore Heureux pour leur expérience dans le réemploi de matériaux, afin de transformer l’atelier électrique en nouveau lieu de travail et de culture, la Grande Halle. Celle-ci, dont l’enveloppe porteuse en béton est conservée, se divise en deux nefs : l’une est pratiquement laissée en l’état et est un lieu d’accueil et de rassemblement, l’autre est divisée en trois niveaux en bois prolongés par des balcons et accueillant café-restaurant, ateliers et espaces de travail ou de répétition.

Une première expérimentation de réemploi a été menée à proximité du projet par le Collectif ETC qui a été chargé de la construction de la cité de chantier. Cet espace temporaire constitué de vieux conteneurs et de matériaux de réemploi (dont une charpente métallique de chapiteau évoquant la toiture de la Grande Halle voisine) est devenu, à l’image de la Maison du projet Morland, lieu d’accueil du public, de médiation et d’échange autour du projet, au travers notamment de la permanence architecturale. L’association le WIP en charge de la gestion et de l’animation de la future Grande Halle, et afin d’en préfigurer les usages, s’était installée dans la cité de chantier.

Pour le chantier lui-même, le marché du projet a été divisé en plusieurs lots avec variante obligatoire relative au réemploi. Un lot spécifique au réemploi – le lot 1 – a été également créé et confié au WIP. Sa mission était d’identifier les gisements à proximité du chantier, de déconstruire et collecter, d’éventuellement remettre en état et de fournir les matériaux aux entreprises chargées du chantier en les stockant sur site dans des conteneurs. Des « fiches matériaux » ont été rédigées afin d’informer sur leur origine et leurs caractéristiques techniques. Ces fiches ainsi qu’un travail étroit avec les bureaux d’étude et les assureurs ont permis de rendre possible l’utilisation de tels matériaux. Il est à noter qu’un réel accompagnement au réemploi pour les entreprises du chantier a été effectué, grâce entre autres à la permanence architecturale. Le WIP, qui envisage le développement à plus long terme d’une plateforme physique de réemploi, a évalué les bénéfices de telles pratiques en terme de création d’emploi local à presque 2 ETP et a également estimé une réduction de CO2 de 25t ainsi qu’une diminution des déchets produits de 19t !

Voici une liste de matériaux de réemploi utilisés sur le site du projet :

  • 27 radiateurs en fonte et 25 en acier (provenant d’un immeuble de bureaux et d’un garage);
  • 31 pièces de sanitaires (vasques, WC, urinoirs, provenant d’immeubles de bureaux et d’activités);
  • 21 poteaux de garde-corps (issus notamment de bois de charpente);
  • 1 fenêtre sur 21 intégrables au projet à la suite d’un vol (provenant d’un bâtiment d’activités);
  • 18 portes en bois massif dont 2 portes coupe-feu (provenant d’immeubles d’habitation);
  • 200 m² d’isolant (dalles en laine de roche intégrée en faux-plafond et provenant d’immeubles de bureaux et d’activités);
  • carrelage et faïence (provenant notamment de fin de stock);
  • bois de menuiserie (issu des palettes de transport des matériaux).

Source: MOOC – Le réemploi : matières à bâtir, organisé par l’ICEB ; le WIP, dont un poster est disponible ici sous licence Creative Commons – Attribution – Pas d’Utilisation Commerciale – Pas de Modification 4.0 International – avec d’autres détails concernant notamment les traitements effectués en vue du réemploi. 

Maison du projet Morland

Maison du projet Morland, 2018, Paris – Emerige (Project owner), Encore Heureux (conception), Encore Heureux + MI2S ingénierie + Albert&Compagnie + Esselinck Ingénierie (Team) – photography by Cyrus Cornut (courtesy of Encore Heureux)

Dans le cadre de l’appel à projets urbains innovants « Réinventer Paris » lancé en 2014, l’ancienne préfecture de Paris boulevard Morland est en cours de réhabilitation. Le projet « Morland Mixité Capitale », porté par le promoteur Emerige et mené par une équipe dont fait partie notamment David Chipperfield, la transformera en lieu de vie aux usages multiples. La déconstruction de l’imposant site administratif met en évidence une mine de matériaux au potentiel de réemploi non négligeable. Une fois identifié ce potentiel important, les architectes d’Encore heureux, se sont vu confier la réalisation d’une construction temporaire, à proximité du chantier principal, la Maison du projet Morland, intégrant une partie de ce gisement. Le reste sera quant à lui utilisé sur le projet de réhabilitation lui-même, pour d’autres aménagements de chantier ou bien sur des chantiers ex-situ.

La réalisation d’Encore Heureux s’insère donc dans la logique plus large du réemploi d’un gisement de matériaux. Construite en bonne partie avec des éléments provenant de ce gisement, sa façade rideau sur ossature bois intègre par exemple 78 ouvrants de fenêtre ! La Maison du projet Morland est bien sûr un espace dédié au projet mais le Pavillon de l’Arsenal, Centre d’urbanisme et d’architecture de Paris, y a également proposé des ateliers-spectacles pour enfants, autour de l’architecture et de la ville contemporaine, conçus par les architectes de PLUS+MIEUX création.

Voici une liste partielle des éléments du gisement, dont certains ont été réemployés dans le projet d’Encore Heureux :

  • 1500 fenêtres ;
  • 11000 plaques de faux-plafond en métal ;
  • 2200 radiateurs ;
  • dalles en pierre ;
  • cloisons ;
  • luminaires.

Pavillon Circulaire

Pavillon Circulaire, 2015, Paris – Pavillon de l’Arsenal (Project owner), Encore Heureux (conception), Tribu + Bonnefrite + Camping Design (Team) – photography by Cyrus Cornut (courtesy of Encore Heureux)

Le Pavillon Circulaire, installé sur le parvis de l’Hôtel de Ville de Paris au moment de la COP 21 de 2015, est l’oeuvre du collectif d’architectes Encore Heureux, commanditée par le Pavillon de l’Arsenal (Centre d’urbanisme et d’architecture de Paris). Préoccupé par les questions de réemploi, le collectif a conçu un pavillon temporaire, circulaire non pas quant à sa forme mais bien quant à son processus de fabrication. Cet espace polyvalent, à la façade bardée de portes en chêne et destiné à accueillir de petits événements ainsi qu’un bar, se voulait une expérimentation mais aussi la démonstration des possibilités du réemploi des matériaux.

Si l’aspect temporaire du pavillon et sa structure légère permettent certes de contourner certaines difficultés notamment normatives ou techniques, le projet n’en demeure pas moins exemplaire et le but qu’il s’était fixé atteint. Il aura contribué à faire parler du réemploi et à mettre en avant les problématiques portées par Encore Heureux. Ainsi, les principes de l’économie circulaire ont permis sa construction avec une main d’œuvre et des matériaux principalement locaux puisque 70% des matériaux de réemploi sont parisiens et que les ouvriers de la Ville de Paris y ont pris une part importante.

Voir également à ce sujet un article de la revue AMC.

Voici une liste des éléments réemployés dans le projet ainsi que leur provenance :

  • 180 portes en chêne, provenant de la réhabilitation d’un immeuble de logement ;
  • isolation en laine de roche, provenant des travaux de toiture d’un supermarché ;
  • structure en bois, provenant des restes d’un chantier de maison de retraite ;
  • panneaux de sol et murs, réemploi de panneaux d’exposition ;
  • caillebotis extérieurs, provenant de l’opération Paris-Plage ;
  • 50 chaises en bois, provenant de déchetteries parisiennes ;
  • suspensions lumineuses, provenant du stock des éclairages publics.

LibreBook / Dekkera

Les deux projets présentés ici sont des projets bruxellois d’aménagement intérieur réalisés par Rotor et faisant une large place au réemploi. Le premier concerne l’aménagement de la librairie LibreBook, présentant une sélection d’ouvrages dans la plupart des langues européennes et permettant également d’accueillir de petits événements ou expositions. Le second est la transformation d’une ancienne épicerie en un bar et magasin spécialisé en bières artisanales et locales, sous le nom de Dekkera.

Les liens entre le réemploi et la philosophie des deux projets sont ici importants, qu’il s’agisse du choix de matériaux racontant une histoire à l’image des livres de LibreBook ou l’importance de la qualité de produits artisanaux et locaux voulue par Dekkera. Ainsi, une fresque provenant d’anciens décors de l’Opéra de la Monnaie est utilisée comme papier peint et crée l’ambiance particulière d’une partie plus intimiste de la librairie. Le comptoir du bar-magasin est quant à lui habillé de matériaux de qualité et provenant de déconstructions locales, comme un ancien plancher en bois de bout ou d’anciens carreaux de céramique d’une station de métro bruxelloise.

Voici une liste de matériaux de réemploi et leurs quantités utilisés dans le projet de la librairie LibreBook (source Opalis), la plupart des matériaux (hormis le parquet) étant fournis et mis en œuvre par Rotor :

  • 80 m² de parquet en chêne ;
  • 15m de faux-plafond utilisés comme panneaux muraux ;
  • 120 m² de panneaux multiplex ;
  • 35 luminaires ;
  • 10 étagères en métal ;
  • une cuisine équipée ;
  • 50m² de toile peinte ;
  • 15m de rails pour spots ;

Voici une liste de matériaux et leur provenance, utilisés dans le projet du bar-magasin Dekkera :

  • ancien plancher en bois de bout de Mahogany utilisé en habillage du bar ;
  • carreaux de céramique provenant du métro bruxellois et utilisés en habillage du bar ;
  • faux-plafond « mille-feuille » provenant d’un immeuble de bureaux ;
  • dalles de basalte provenant de la façade d’un immeuble de bureau et utilisées en pavement de sol ;

Sanitary block with reused materials

En Belgique, les concepteurs de Rotor, très actifs dans le domaine du réemploi, ont notamment réalisé pour un mouvement de jeunesse local (le Chiro d’Itterbeek) le projet d’un bloc sanitaire attenant à une construction existante, une ancienne ferme en briques rouges. Situé à Dilbeek, en périphérie de Bruxelles, ce projet est réalisé lui aussi en briques rouges, afin de s’insérer dans l’existant. Modeste par sa taille, l’extension n’en est pas moins exemplaire. Elle est en effet constituée de moins d’un tiers de matériaux neufs ! Les matériaux de réemploi ou de surplus de chantier qui y sont utilisés concernent tant le gros œuvre que les finitions. La volonté de Rotor de montrer qu’un tel projet est possible tout en cherchant à identifier les différents freins au réemploi se traduit notamment par un précieux travail de documentation et de communication.

L’implication nécessaire de différents acteurs est à souligner. La commune de Dilbeek, tout d’abord, un commanditaire public, la Coopérative de Construction AUTREMENT, entreprise active dans l’éco-construction et le réemplo, chargée de la mise en œuvre, ainsi qu’une série de fournisseurs de matériaux d’horizons très divers : Rotor; Franck spécialisé dans la déconstruction, le nettoyage et la revente de briques; Bouwstocks magasin de matériaux de réemploi; Gebruiktebauwmaterialen plateforme de vente de matériaux d’un démolisseur; l’association à but non lucratif Croisade Pauvreté, travaillant avec des volontaires afin de fournir des matériaux de seconde main très bon marché; un chantier privé situé à proximité.

Voici ci-après une liste de ces matériaux de réemploi ou de surplus de chantier utilisés sur le projet (source Opalis) :

  • 2,7 m³ de briques de parement ;
  • 6,7 m³ de blocs de béton ;
  • Structure de toiture en bois ;
  • 20 m² de tuiles ;
  • 29 m² d’isolation de murs, 14 m² d’isolation de sol, 20 m² d’isolation de toiture ;
  • 3 linteaux, 4 portes ou fenêtres ;
  • 14 m² de carrelages en céramique ;
  • 8 éléments de sanitaires ;
  • 5 luminaires ;

La Fabrique du clos

À Stains, en Ile-de-France, la démolition de tours d’immeuble et de leurs voiles de béton datant de 1959, a donné lieu depuis cinq ans à la réutilisation in situ de cette matière aux impacts environnementaux majeurs. Le projet est mené par Seine Saint Denis Habitat et les architectes de Bellastock, accompagnés notamment par le CSTB (Centre Scientifique et Technique du Bâtiment).

La démarche, aux objectifs à la fois environnementaux, sociaux et culturels a abouti à la création de prototypes comme un sol scellé en dalle de béton, de la maçonnerie paysagère en pierre de béton pouvant servir de banc ou de jardinière et d’un local technique en murs de béton. Cette démarche a également mené à un plan d’aménagement d’espaces publics, à la mise en place d’une recyclerie, mais aussi à des programmes de sensibilisation, de formation et de création, en partant de l’échelle du quartier.

Une étude menée sur 60m2 de pavage en béton réemployé a déterminé un taux de réemploi du gisement destiné au pavage de 86%. L’étude met également en évidence, un délai supplémentaire de seulement 4 jours de chantier consacrés au réemploi et un coût au m2 de 25,2€ (soit 10 euros de moins qu’un pavage neuf estimé à 35,2euros). L’importance du travail in situ et du caractère expérimental sont ici à souligner.

Pavés

Street Paver – Paris 1899-1900, Eugène Atget – Library of Congress (Public domain)

Le Ministère de la Transition écologique et solidaire français a publié en 2018 un article sur le recyclage et le réemploi de matériaux de voirie par la Ville de Paris. Un grand nombre de matériaux sont ainsi réemployés après nettoyage et c’est notamment le cas de certains types de pavés. La quantité de pierres naturelles de récupération posées en voirie y est passée en dix ans de 20% à 80%, inversant ainsi les proportions !