LibreBook / Dekkera

Les deux projets présentés ici sont des projets bruxellois d’aménagement intérieur réalisés par Rotor et faisant une large place au réemploi. Le premier concerne l’aménagement de la librairie LibreBook, présentant une sélection d’ouvrages dans la plupart des langues européennes et permettant également d’accueillir de petits événements ou expositions. Le second est la transformation d’une ancienne épicerie en un bar et magasin spécialisé en bières artisanales et locales, sous le nom de Dekkera.

Les liens entre le réemploi et la philosophie des deux projets sont ici importants, qu’il s’agisse du choix de matériaux racontant une histoire à l’image des livres de LibreBook ou l’importance de la qualité de produits artisanaux et locaux voulue par Dekkera. Ainsi, une fresque provenant d’anciens décors de l’Opéra de la Monnaie est utilisée comme papier peint et crée l’ambiance particulière d’une partie plus intimiste de la librairie. Le comptoir du bar-magasin est quant à lui habillé de matériaux de qualité et provenant de déconstructions locales, comme un ancien plancher en bois de bout ou d’anciens carreaux de céramique d’une station de métro bruxelloise.

Voici une liste de matériaux de réemploi et leurs quantités utilisés dans le projet de la librairie LibreBook (source Opalis), la plupart des matériaux (hormis le parquet) étant fournis et mis en œuvre par Rotor :

  • 80 m² de parquet en chêne ;
  • 15m de faux-plafond utilisés comme panneaux muraux ;
  • 120 m² de panneaux multiplex ;
  • 35 luminaires ;
  • 10 étagères en métal ;
  • une cuisine équipée ;
  • 50m² de toile peinte ;
  • 15m de rails pour spots ;

Voici une liste de matériaux et leur provenance, utilisés dans le projet du bar-magasin Dekkera :

  • ancien plancher en bois de bout de Mahogany utilisé en habillage du bar ;
  • carreaux de céramique provenant du métro bruxellois et utilisés en habillage du bar ;
  • faux-plafond « mille-feuille » provenant d’un immeuble de bureaux ;
  • dalles de basalte provenant de la façade d’un immeuble de bureau et utilisées en pavement de sol ;

Sanitary block with reused materials

En Belgique, les concepteurs de Rotor, très actifs dans le domaine du réemploi, ont notamment réalisé pour un mouvement de jeunesse local (le Chiro d’Itterbeek) le projet d’un bloc sanitaire attenant à une construction existante, une ancienne ferme en briques rouges. Situé à Dilbeek, en périphérie de Bruxelles, ce projet est réalisé lui aussi en briques rouges, afin de s’insérer dans l’existant. Modeste par sa taille, l’extension n’en est pas moins exemplaire. Elle est en effet constituée de moins d’un tiers de matériaux neufs ! Les matériaux de réemploi ou de surplus de chantier qui y sont utilisés concernent tant le gros œuvre que les finitions. La volonté de Rotor de montrer qu’un tel projet est possible tout en cherchant à identifier les différents freins au réemploi se traduit notamment par un précieux travail de documentation et de communication.

L’implication nécessaire de différents acteurs est à souligner. La commune de Dilbeek, tout d’abord, un commanditaire public, la Coopérative de Construction AUTREMENT, entreprise active dans l’éco-construction et le réemplo, chargée de la mise en œuvre, ainsi qu’une série de fournisseurs de matériaux d’horizons très divers : Rotor; Franck spécialisé dans la déconstruction, le nettoyage et la revente de briques; Bouwstocks magasin de matériaux de réemploi; Gebruiktebauwmaterialen plateforme de vente de matériaux d’un démolisseur; l’association à but non lucratif Croisade Pauvreté, travaillant avec des volontaires afin de fournir des matériaux de seconde main très bon marché; un chantier privé situé à proximité.

Voici ci-après une liste de ces matériaux de réemploi ou de surplus de chantier utilisés sur le projet (source Opalis) :

  • 2,7 m³ de briques de parement ;
  • 6,7 m³ de blocs de béton ;
  • Structure de toiture en bois ;
  • 20 m² de tuiles ;
  • 29 m² d’isolation de murs, 14 m² d’isolation de sol, 20 m² d’isolation de toiture ;
  • 3 linteaux, 4 portes ou fenêtres ;
  • 14 m² de carrelages en céramique ;
  • 8 éléments de sanitaires ;
  • 5 luminaires ;

La Fabrique du clos

À Stains, en Ile-de-France, la démolition de tours d’immeuble et de leurs voiles de béton datant de 1959, a donné lieu depuis cinq ans à la réutilisation in situ de cette matière aux impacts environnementaux majeurs. Le projet est mené par Seine Saint Denis Habitat et les architectes de Bellastock, accompagnés notamment par le CSTB (Centre Scientifique et Technique du Bâtiment).

La démarche, aux objectifs à la fois environnementaux, sociaux et culturels a abouti à la création de prototypes comme un sol scellé en dalle de béton, de la maçonnerie paysagère en pierre de béton pouvant servir de banc ou de jardinière et d’un local technique en murs de béton. Cette démarche a également mené à un plan d’aménagement d’espaces publics, à la mise en place d’une recyclerie, mais aussi à des programmes de sensibilisation, de formation et de création, en partant de l’échelle du quartier.

Une étude menée sur 60m2 de pavage en béton réemployé a déterminé un taux de réemploi du gisement destiné au pavage de 86%. L’étude met également en évidence, un délai supplémentaire de seulement 4 jours de chantier consacrés au réemploi et un coût au m2 de 25,2€ (soit 10 euros de moins qu’un pavage neuf estimé à 35,2euros). L’importance du travail in situ et du caractère expérimental sont ici à souligner.

Pavés

Street Paver – Paris 1899-1900, Eugène Atget – Library of Congress (Public domain)

Le Ministère de la Transition écologique et solidaire français a publié en 2018 un article sur le recyclage et le réemploi de matériaux de voirie par la Ville de Paris. Un grand nombre de matériaux sont ainsi réemployés après nettoyage et c’est notamment le cas de certains types de pavés. La quantité de pierres naturelles de récupération posées en voirie y est passée en dix ans de 20% à 80%, inversant ainsi les proportions !